Un jury d'écrivains pas pour de rire (quoique...)

En créant le Prix de la Nouvelle Humoristique francophone, Libres Plumes veut favoriser la rencontre entre écrivains connus et auteurs en devenir. Avec, pour tous, le rire en ligne de mire.

Pour mener à bien ce projet et constituer un jury digne des nouvellistes participant au concours, une obligation, douce et bienfaisante, certes, mais exigeante et sérieuse : lire du rire. Chercher les écrivains qui (s')amusent à l'écrit et seront, en mars de l'année suivante, les dignes représentants de ce prix destiné à défendre l'humour en littérature en récompensant des nouvellistes francophones.

 Et trouver celui ou celle qui présidera le jury 2016.

Après avoir reçu l'adorable et inénarrable Philippe Jaenada comme président du jury 2015, j'ai pensé à Romain Puértolas pour lui succéder (Ils sont très différents. C'est là, où moi je m'amuse !). Ce dernier, auteur de L'extraordinaire voyage du Fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikéa (éd. Le Dilettante), m'avait séduite par l'humanisme qui se dégageait de sa fiction originale et déjantée. Je l'ai contacté dès que l'idée a fusé. Il a accepté de présider cette deuxième édition dans la seconde ou presque.

Le dimanche suivant, par courriel, nous avons échangé nos idées de thème d'inspiration pour ce Prix 2016. Je sollicite toujours le président du jury pour cette délicate affaire. À l'époque, son prochain roman est en attente de parution (prévue fin septembre 2015) chez le même éditeur. Hors, le père du Fakir est un écrivain facétieux. Sans dévoiler Re-vive l'Empereur ! (ce dernier livre encore secret), il fait un clin d’œil à l'époque de son prochain personnage, Napy (Napoléon pour les néophytes), en proposant comme sujet "un réveil au XVIIIème siècle" (dans son Re-vive l'Empereur !, c'est plutôt son grand personnage revenu du XVIIIème qui se réveille au XXIème, mais ça, il ne le dit pas). Me remémorant Sophie Morceau, croisée près de l'armoire Ikéa, je lui propose de rajouter "Votre star préférée". Ainsi, le thème "Votre star préférée se réveille au XVIIIème siècle" naît.

Forts de cette entente virtuelle productive, nous nous rencontrons en mars 2015 au salon du Livre de Paris. Il me dédicace son deuxième roman, La petite fille qui avait avalé un nuage grand comme la Tour Eiffel, un conte pour adulte, original, touchant et bienveillant écrit pour tous ceux qui ont encore envie de rêver et de voyager en agréable compagnie, au-delà des nuages.

Or, j'ai eu beau rêver, un président tout seul c'est triste et ça ne me fait pas rire.

Il est donc d'usage, chez Libres Plumes, de demander à chaque président quel est l'écrivain humoristique qu'il aimerait voir à ses côtés dans le jury final. À cette question, Romain Puértolas me répond avoir beaucoup ri avec Les lumières du ciel  d'Olivier Maulin. Il n'a jamais rencontré l'auteur ; ce serait l'occasion. Je lui propose de le lire avant de me prononcer (même si je ne doute pas de son choix, je demeure tout de même curieuse et amatrice de bidonnage à la page !) et je file à ma librairie. Je lis et je ris, ris, ris. Tant que je ne m'arrête pas à ces seules Lumières du ciel. J'achète le dernier paru, Gueule de bois et enfin Le bocage à la nage, plus ancien. Les deux ne sont pas sans me rappeler le grand René Fallet, écrivain (adoré) du célèbre Triporteur ou autres Vieux de la vieille. Je contacte ce fameux Olivier Maulin. Il accepte aussitôt. Je suis enchantée. Le prix 2016 est bien parti. Il y a déjà deux écrivains amusants.

Et les femmes ?

Immédiatement, je pense à deux d'entre elles. Pascale Pujol qui vient de signer au Dilettante, Petits plats de résistance, son premier roman, dégusté immédiatement à sa sortie et sans modération, au ton résolument humoristique avec des personnages hauts en couleur et des situations cocasses et Céline Santran, dont j'ai lu La faute à Rostro  (Éditions du 38) qui m'a fait beaucoup rire (aussi !) en plus de me plonger dans le monde des adolescents comme si j'en étais...encore. Deux auteurs à l'humour très différent, deux romans écrits par des femmes aux allures sérieuses mais à la drôlerie chevillée au cœur.

Et pour compléter, une troisième auteure, heureuse lauréate du 1er Prix de la Nouvelle Humoristique 2015 qui, avec son humour "so british", a su gagner les zygomatiques du jury de l'an passé, Franz Bartelt en tête. Dans Une vie de rêve, son premier recueil, Marie Lauzeral confirme ce premier succès dans le genre et sa place aux délibérations pour le Prix 2016.

Cinq auteurs différents. Un jury d'écrivains pas pour de rire. Quand je vous le disais !

Ce qui n'est pas trop peu pour défendre l'idée selon laquelle, en littérature, l'humour peut être explosif, mystérieux, cruel, imbécile, tendre, philosophe ou tout cela à la fois, il est cependant toujours affaire de partage. Car, si faire rire en écrivant est le plus beau des métiers, ceux qui ont de l'humour sont souvent de belles personnes.

Le 13 mars 2016, nous serons là pour les fêter. Je vous espère nombreux pour les rencontrer. Histoire de lire. Histoire de rire.

Élodie Torrente

Directrice Libres Plumes